Contrats de travail à durée indéterminée non permanents – Transformation en CDI

Transformation d’un « CDI non permanent » en CDI – Transformation de CDI successifs en CDI


Fiche courte rédigée par Pierre Déjean


22/02/2024 – Affaires C‑59/22, C‑110/22 et C 159/22

Les faits :

La Cour a lié trois affaires pour lesquelles le contentieux est similaire :

Pour les deux premières affaires, les plaignants demandent la requalification en CDI permanent d’un “CDI non permanent” (création jurisprudentielle). Dans la troisième affaire le plaignant demande la reconnaissance en CDI d’une série de contrats à durée déterminée successifs. NDLR : pour une lecture commode ces affaires donneront lieu à deux fiches complètes.

Les juridiction de renvoi ont posé plus de 12 questions préjudicielles. NDLR : nous en retiendrons quatre en ce qu’elles posent des questions de principe.

Les questions préjudicielles

Question 1 ) La question se pose de savoir si les clauses 2 et 3 de l’accord cadre sur le travail à durée déterminé doivent être interprétées en ce sens que les CDI non permanents sont en réalité des CDD relevant du champ d’application de l’accord.

Le raisonnement de la Cour (points principaux) :

La Cour précise que la notion de travailleur à durée indéterminé non permanent (création jurisprudentielle) doit être distingué de la notion de travailleur permanent.

Le CDI non permanent est soumis à une cause de cessation spécifique : une procédure respectant les principes constitutionnels de publicité, égalité, mérite et aptitude.

L’attribution du poste au lauréat limite par ce terme la durée du CDI non permanent.

La réponse de la Cour :

Aux fin d’application de l’accord-cadre, le CDI non permanent doit être considéré comme un CDD.

—————–

Question 2 ) La question se pose de savoir si la clause 5 de l’accord cadre sur le travail à durée déterminé concerne une situation dans laquelle l’administration est lié par un seul CDI non permanent résiliable.

Le raisonnement de la Cour (points principaux) :

Selon l’accord-cadre, les États membres déterminent les conditions dans lesquelles les CDD sont considérés comme successifs.

Cependant, les États ne peuvent remettre en cause l’objectif et l’effet utile de l’accord et notamment en ce qui concerne le caractère successif des contrats.

Le terme du CDI non permanent est subordonné à une procédure publique de sélection.

L’administration n’a organisé aucune procédure depuis 20 ans.

La réponse de la Cour :

Dans cette hypothèse, les CDI non permanents sont prorogés automatiquement, ce qui peut être assimilé à des renouvellements de CDD successifs.

————————

Question 3 ) La clause 5 de l’accord-cadre s’oppose t’elle à une réglementation qui ne prévoit aucune des mesures prévues par l’accord ou à défaut des “mesures équivalentes” ?

Le raisonnement de la Cour (points principaux) :

Le gouvernement espagnol estime que le CDI non permanent répond aux caractéristiques de la clause 5 1)a) évoquée dans l’accord (raisons objectives justifiant le renouvellement de tels contrats ou relations de travail) : il offre une garantie d’accès à l’emploi.

La Cour conteste. Les raisons objectives concernent le renouvellement et non l’application d’un type de contrat tel que le CDI non permanent. De plus la réglementation des procédures de sélection ne permet pas d’assurer leur réalisation effective.

La réponse de la Cour :

La réglementation en cause ne contient pas de mesures effectives et dissuasives pour garantir l’efficacité de l’accord-cadre. Elle ne peut donc être qualifiée de “mesure légale équivalente” au sens de l’accord-cadre.

———————–

Question 4 ) Peut on interpréter la clause 5 de l’accord-cadre en ce sens que, faute de mesures adéquates pour prévenir les recours abusifs aux CDD, ces CDD devraient être transformés en CDI ?

Le raisonnement de la Cour (points principaux) :

La réglementation nationale ne peut être considérée comme conforme à la clause 5 de l’accord cadre que si elle comporte une mesure effective de sanction.

Si, au cours de son travail d’interprétation conforme la juridiction de renvoi constate qu’il n’y a pas de mesure effective pour remédier à des abus, alors la transformation en relation à durée indéterminée constitue une mesure adéquate.

Si la juridiction de renvoi constate l’opposition du Tribunal Supremo à cette transformation, alors elle devra modifier cette jurisprudence.

La réponse de la Cour :

La clause 5 de l’accord-cadre doit être interprété en ce sens que, faute de mesure adéquate dans la législation nationale, la transformation en relation à durée indéterminée constitue une telle mesure.

La juridiction nationale devra en ce cas modifier une jurisprudence qui s’opposerait à cette transformation, même si cette jurisprudence découle d’une interprétation de la Constitution.